• Triple buse

    Ce matin, je l'ai vue, à peu près au même endroit que la dernière fois. La buse. Dans la lumière du matin, dans les branches dénudées d'un arbre en contre-jour, elle surplombait la route. Je l'ai cherchée, ce soir, au retour, je ne l'ai pas vue, mais ce n'est pas bien grave, je me dis que je la reverrai certainement un de ces jours.

    C'est dommage quand même car ça m'aurait bien changé les idées. Une énième confrontation avec mon ex-conjoint, dont je suis sortie énervée, frustrée de ne pouvoir m'exprimer, rageuse d'un litige financier qui déploie ses épines entre nous - et bien sûr l'argent est certainement le symbole d'autres choses.

    L'autre midi, au café, un de mes collègues arrivé il y a peu, m'a dit "mais vous allez vendre la maison ?". Mes autres collègues ont rigolé. Toute honte bue j'ai répondu à ce collègue : "eh bien tu vois, parfois, dans la vie, tu fais des conneries, et tu te les manges toute ta vie ensuite." Je me fous pas mal que mes collègues se moquent de moi. Un divorce, ça parait presque facile, vu de l'extérieur. Il faut le vivre pour connaître les tensions, les rapports de force qui peuvent se jouer entre deux personnes à ce moment là. Pour "réussir" un divorce, il faudrait paradoxalement bien s'entendre. Et malheureusement, un divorce engage bien plus, finalement, qu'un mariage. J'aurais fort à dire sur les récentes lois sur le divorce, qui ont simplifié les procédures - et il ne faut pas croire que le juge des affaires familiales joue un quelconque rôle. Le passage devant le juge, c'est un quart d'heure chrono - et pas une minute de plus. J'ai signé une convention de divorce ahurissante, parce que j'étais "à l'ouest" à ce moment là, parce que je me sentais coupable (de quoi ? de rien), parce que je n'ai pas osé dire ce que je pensais, que je n'ai pas osé faire front, parce que je me suis laissée faire. Autant de raisons qui me mettent en colère aujourd'hui - contre moi avant tout. En même temps, dans certaines circonstances, l'argent, ça semble si peu important, on sent bien que ce n'est que le symbole d'autre chose, et on abandonne à  l'autre ce symbole...

    Ces trois jours qui viennent, je serai en Savoie, avec mes parents. Un des frères de ma mère est mort. Famille nombreuse, j'ai vécu mon enfance avec de multiples allées et venues de mes oncles et tantes. Joyeux bazar à la maison. Il y en a eu, des matins où j'étais réveillée par les voix d'un oncle ou d'une tante arrivé au petit matin, une poche de croissants dans une main, le sac de voyage dans l'autre ! Voyages, déménagements, divorces... ils passaient chez nous au gré des évênements de leurs vies. De cet oncle, je garde le souvenir d'un premier mariage en grande pompe, uniformes blancs et pompons de marins dans le cortège ; j'avais cinq ans et je tombai amoureuse pour la première fois, d'un pompon rouge. Ce premier mariage se termina par un divorce, et il abandonna à son ex-femme les trois quarts de son salaire en pension alimentaire.

    Je crois que ça doit être une question de gènes.


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