• Les journées du patrimoine - 1

    J'avais prévu une visite d'un réservoir d'eau potable, hier après-midi, mais mon gps m'a lâché, juste au moment où je le mettais en route pour partir, or le réservoir est dans un coin de Bordeaux que je ne connais pas du tout. Changement de programme, que je n'ai pas regretté. Je suis allé visiter la Bourse du Travail de Bordeaux. La BT, je la connaissais pour l'avoir fréquentée, lorsque j'étais étudiante. A l'époque, consciente que mes études ne me mèneraient pas loin dans une voie professionnelle (le latin me barrant la route vers le professorat de français), je me suis inscrite à des cours du soir qui préparaient au CAP de sténo-dactylographe. Voilà bien un mot disparu de notre dictionnaire. Ce n'est que hier que j'ai compris que ces cours étaient financés en grande partie par la CGT, qui occupe la Bourse du Travail. Je prenais des cours du soir, trois fois par semaine, ce n'était pas toujours évident, en plein hiver, de se motiver pour y aller, je prenais les derniers bus du soir pour rentrer chez moi à 20 h 30. Quand nous arrivions à 18 h 30 pour le début des cours, il fallait traverser le grand hall de la Bourse, froid et peu accueillant, et monter jusqu'au dernier étage. De là, aux beaux jours de l'automne ou du printemps, on avait une vue splendide sur les toits bordelais. Pendant trois ans, j'ai appris la sténo, la dactylo, et quelques rudiments des matières dont nous avions besoin pour le CAP, classement, arithmétique... Nous devions être une petite vingtaine, à taper sur de vieilles Olivetti... mécaniques, même pas électriques ! Je garde un bon souvenir de ces cours. Une des curiosités du lieu était (car je n'ai découvert que  hier les véritables trésors de l'immeuble) l'ascenseur. Il datait de la contruction de la Bourse, c'est à dire 1936. La cage était tout métalique, ainsi que l'ascenseur lui-même, on y entrait par une porte qu'on ouvrait, puis il fallait replier une grille, comme on voit dans certains films, si on y prête attention, notamment assez souvent dans les comédies se passant à Paris. L'ascenseur était poussif, mais il n'est jamais tombé en panne. Aujourd'hui la cage métalique existe toujours, mais l'appareil lui-même a été changé pour un appareil aux normes.

    Bref, la Bourse du Travail. Construite dans les beaux jours du Front Populaire, en 1936, architecture triomphante de l'époque, béton et décoration Art Déco. Aujourd'hui le bâtiment est en mauvais état, la mairie traîne des pieds pour entamer des travaux qui s'avèrent de plus en plus important au fur à mesure qu'on laisse pourrir la  situation. Il a tout de même été classé, en 1998, à l'inventaire des monuments historiques.

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    Quand on voit le bâtiment, il parait sombre, bizarrement fichu. En fait, il est remarquablement conçu. Il bénéficie d'une clarté extraordinaire, mis à part le hall, et encore, c'est relatif, car il est suffisamment éclairé par les grandes portes que l'on distigue, pour ne pas avoir besoin d'éclaire artificiel. Si l'on regarde bien la photo, on voit une multitude de fenêtres sur le côté gauche, qui est la façade ouest, et, sur la façade avant, comme sur la façade est, de longues ouvertures permettent à la lumière d'entrer largement. Au centre du bâtiment, une vaste cour a été créée, et tous les locaux du bâtiment bénéficie donc d'une bonne luminosité. Ces hautes colonnes blanches correspondent à un vaste théatre, car le Front Populaire se préoccupe de la démocratisation de la culture. Il servira de théatre, de lieu de chant pour les chorales du quartier, pour des fêtes, il possède également une salle de projection qui le transforme donc en cinéma. Tout en haut du bâtiment, la terrasse, puisque le bâtiment est à toit plat, comme beaucoup d'immeubles de cette période.
     
    La Bourse du Travail est au départ un lieu destiné aux syndicats, pour que ceux-ci puissent se consacrer à leurs activités dans des locaux corrects, mais les premières bourses du travail, fondées à la fin du XIXème siècle, étaient également des endroits où les patrons venaient chercher du personnel, d'où le terme de "bourse". Les murs appartiennent aux mairies, les syndicats en sont les affectataires. Actuellement la BT de Bordeaux est affectée à la CGT.
     
    Comment l'ignorer....
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    Mais le véritable trésor de cette Bourse, ce sont des fresques monumentales réalisées par des artistes de renom de l'époque. Fresques à la gloire de l'activité économique florissante de l'époque, du commerce, y compris du commerce d'Outre-Mer, du port de Bordeaux, etc. Les peintures sont situées en hauteur, de surcroit je manquais de recul, j'ai donc eu du mal à prendre des photos. Je me contente de vous présenter celle-ci :
     

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    On notera, sur la droite, l'image idyllique de la fraternisation du soldat et du paysan. Paradoxalement, sur les différentes fresques il n'y a pas d'ouvrier représenté, ces peintures sont plutôt "classiques", comme celle-ci qui célèbre la vigne tout en utilisant des éléments qui s'inscrivent dans la longue lignée de la peinture : corne d'abondance, divinité dénudée, angelots... On remarquera aussi les feuilles d'acanthe ;-) sous la corne d'abondance.
     
    Le monde du travail se retrouve, dans une certaine mesure, non dans ces fresques mais dans des éléments décoratifs. Ainsi, les rampes d'escalier rappellent les isolateurs électriques
     
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    et, de façon plus discrète, en ornement de la cage d'ascenseur dont j'ai parlé plus haut :
     
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    La visite, guidée, était menée par une militante cégétiste, qui s'est spécialisée dans l'Histoire sociale. Il est certain que pour un bâtiment comme celui-ci, on ne peut séparer l'Histoire de l'architecture.
     
    Dans le hall d'accueil, un certain nombre de brochures étaient donc à notre disposition, dont celle-ci, dont je suis sûre qu'elle intéressera un de mes lecteurs, amateur de la célèbre vague d'Hokusai  ;-)
     
    cgt
     
    Avec le recul, je n'en reviens pas d'être passée côté de cet aspect là de la Bourse du Travail, quand je la fréquentais pour les cours du soir. A ma décharche, je dois dire que le bâtiment, après la fermeture des bureaux, se prêtait peu à la balade à travers ses couloirs immenses et vides. J'ai d'ailleurs longtemps cauchemardé à ce sujet !
     
    Au final, une visite que j'ai été très heureuse de faire !

  • Commentaires

    1
    Tonax
    Lundi 19 Septembre 2011 à 23:24
    Elle manque un peu de space invaders CGT, cette bourse du travail !
      • Feuilles_d_Acanthe Profil de Feuilles_d_Acanthe
        Mardi 20 Septembre 2011 à 22:33
        C'est vrai, ce serait pourtant drôle :-)
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    Rolvel
    Lundi 31 Octobre 2011 à 10:45
    Merci pour cette vague! En contre partie, voici justement une affiche du CNT avec un space invader!!! (j'en ai trouvé une ;-) http://i45.photobucket.com/albums/f81/grdd/A%20voir/AfficheSpaceFuku.jpg http://i45.photobucket.com/albums/f81/grdd/A%20voir/AfficheSpace.jpg
      • Feuilles_d_Acanthe Profil de Feuilles_d_Acanthe
        Mardi 1er Novembre 2011 à 18:28
        Si même le CNT s'y met ! je m'incline bien bas, bravo et merci pour la trouvaille :-)
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