C'est un endroit un peu magique. Au bout d'un hameau des landes de ce sud Gironde que j'affectionne tant, aux belles demeures anciennes un peu endormies. Des poules picorent en bord de route, il passe peu de monde, un ruisseau chante en contrebas. Et puis cet endroit, en contrebas de la route, gardé par quelques barbelés rouillés et un panneau "réserve de chasse". Un vieux pont de pierre y enjambe le ruisseau, l'herbe jonchée de feuilles mortes y descend en pente douce.
Qui y est venu, assez régulièrement pour construire une cabane, une table et des bancs ? de vieilles souches patinées par le soleil et la pluie sont entassées, en monstres fantastiques, d'anciens pots à résine sont disposés par ci, par là, parfois au fait d'une de ces souches, sans qu'on puisse discerner un ordre quelconque dans cet enchevêtrement mais dû, sans aucun doute, à la main d'un homme. Je n'y ai jamais vu personne, je viens là et je profite du soleil, du son du ruisseau et de ses petites cascades, du chant des oiseaux. Je prends soin de ne rien déplacer, je n'emporte pas un seul de ces pots de résine ancien que j'aimerai pourtant prendre avec moi, comme un talisman des landes Plus tard, il y aura des primevères, un mimosas en fleur, des orties, plus tard encore les chênes retrouveront des feuilles.
L'été prochain, si tout va bien, j'y retournerai. Dans le panier de mon vélo, il y aura de quoi pique-niquer, et puis mon appareil photo, bien sûr, et puis, surtout, l'envie d'y être seule, pour ne point partager ce coin de paradis.