• Le pire, à venir

    Je suis allée à l'ehpad voir mes parents cet après-midi, et j'étais accompagnée de ma tante Christiane, celle qui a 88 ans a encore bon pied bon œil. Elle déprime un peu depuis la mort de mon oncle, en novembre dernier, mais ça, c'est normal.

    Comme nous arrivions, je me suis étonnée de trouver mon père seul dans la chambre, et il nous a de suite expliqué que ma mère a été particulièrement agitée, voire agressive, ces derniers jours, avec des comportements erratiques et confus - elle s'est rendu à plusieurs reprises dans les chambres d'autres résidents, et, hier soir, ne voulait plus sortir d'une des chambres. Le personnel médical a été obligé de lui donner un calmant, et de la placer dans l'unité protégée.

    L'unité protégée, c'est l'unité réservée aux résidents qui ont perdu la tête, ceux atteints d'Alzheimer en particulier. Protégée car l'accès en est interdit, sauf à en avoir le code d'accès.

    Nous sommes donc allées, avec mon père, à l'unité protégée voir ma mère, que j'ai trouvée dans un lit, dans une chambre impersonnelle, toujours aussi confuse bien sûre, et légèrement apathique aussi bien sûr. Quand elle est lucide, elle se rend compte de son état, et se met de suite à pleurer, ce qui rend la situation encore plus difficile à supporter.

    Je sais bien que le pire est devant, que ce soit pour ma mère comme pour mon père. Mais je ne m'attendais pas à ce que ma mère se retrouve dans cette unité protégée, ou alors pas si vite et surtout, je ne savais pas à quoi ressemblait l'unité protégée.

    L'unité protégée ? La Nef des Fous, de Bosch, en grandeur nature, avec le bruit en plus. Le vieillard qui déambule en babygros, l'autre qui répète en boucle à tout nouvel arrivant "et que me vaut l'honneur de votre visite", la vieille qui surgit dans la chambre, hagarde, et montre les dents quand on veut l'en sortir, et ceux qu'on ne voit pas mais qu'on entend hurler… Là, j'avoue, j'atteins les limites de ce que je peux supporter.

    Ma mère ne devrait rester dans l'unité protégée que ce week-end, c'est du moins ce que le médecin de l'ehpad a annoncé à mon père, dans l'attente de l'avis de la neurologue qu'il va contacter dès lundi. 

    Je suis sortie de là atterée, heureusement que ma tante était là sinon je me serais effondrée.

    Rentrée chez moi, je me serais volontiers saoûlée pour oublier ce que je venais de voir, ceci dit ce n'est pas mon genre, à défaut la plaque de chocolat en a pris un coup, et demain j'irais à la salle de sport me défouler.

    Comment faire ensuite ? L'unité protégée, je ne veux pas y remettre les pieds. Mais ça, mon père ne l'admettra jamais. Combien d'horreurs vais-je devoir encore affronter, et pendant combien d'années, encore ? 


  • Commentaires

    1
    Chantal
    Dimanche 28 Avril 2019 à 09:25

    Pourquoi iriez-vous alors que c'est au-dessus de vos forces ? Votre père ira lui.

    Je pense qu'il sera bien obligé de l'admettre puisque c'est votre décision, votre vie. De ce que vous avez pu écrire, il vous juge déjà et mal, alors laissez-le avec ce qu'il pense de vous et faites ce qui est bien pour vous.

    Votre mère est confuse, perd la tête. Vos visites lui font-elles du bien ? Et, plus important, vos visites vous font-elles du bien ? Parfois, c'est parce que nous ne sommes pas complètement à l'aise avec nos positions qu'on a du mal à en faire part aux autres.

    Bon dimanche.

     

    2
    Bleck
    Dimanche 28 Avril 2019 à 14:51

    Bien que je pense que les conseils ne servent à rien, je me range à l'avis de Chantal... j'ai comme qui dirai l'impression que ton sac est plein.

     

    Bleck

    3
    Isabelle
    Mercredi 1er Mai 2019 à 21:12
    Je compatis de tout coeur et je ne peux que te souhaiter bon courage car je sais que de toute façon, tu n'abandonneras jamais totalement tes parents. Et ton père qui fait des réflexions... Epargne-toi le plus possible malgré tout, tes parents ne sont pas très méritants. Les hôpitaux sont en général plutôt des endroits à fuir (selon moi) et là, on atteint le summum. Heureusement que tu as ton univers (ton chez-toi, tes fils, ta petite-fille, tes chattes, etc). N'hésite pas à dire à tes frères et sœur de prendre leur part de la charge, ce n'est pas juste que tout retombe sur toi. Encore une fois, bon courage, il en faut ! Isabelle.
    4
    Mercredi 1er Mai 2019 à 21:21

    Merci à tous pour vos encouragements. Oui Chantal, je me demande en effet pourquoi je continue à aller voir ma mère, et c'est complexe. Sens du devoir, affection, malgré tout, pour ma mère dont le sort est si peu enviable, que sais-je encore… J'ai appris par le cadre de santé de l'ehpad que je peux voir ma mère en dehors de l'espace protégé, il suffit que je le demande à l'accueil et une personne ira me la chercher. Elle a encore des moments de lucidité, et elle me reconnait, et même si la situation est de plus en plus difficile à supporter, au moins suis-je en accord avec ma conscience en essayant de faire face à mes obligations tant que je peux.

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