• Cinéma, juin 2009

     
    Un peu de tout dans les films vus ces dernières semaines. De l'animation (puisque de nos jours on ne dit plus "dessin animé" ce qui, je veux bien l'admettre, était restrictif), en l'occurrence le fameux Coraline, adapté du roman éponyme de Neil Gaiman, le tout premier Scorsese, Who's that knocking at my door, le génialissime Good Morning England, deux productions indépendantes (Story of Jen, Sunshine Cleaning) et enfin, pour le frisson, le dernier Sam Raimi, Jusqu'en Enfer.

    Commençons par la fin : Jusqu'en Enfer, de Sam Raimi, donc. J'ai découvert le genre "horreur" assez recemment, étant du genre particulièrement-spécialement-totalement peureuse. L'année où Les Dents de la Mer sont sortis au ciné, j'étais trop jeune pour aller au ciné, mais j'ai quand même eu du mal à me baigner cette année-là. Voilà qui donne une idée de mon niveau de résistance à la peur et d'impressionnabilité… La première fois que j'ai vu Alien (à la télé, bien sûr), j'ai autant entendu les battements de mon cœur que la bande-son du film… Mais l'an dernier j'ai lu un bouquin de Thomas Gunzig, qui s'intitule 10 000 litres d'Horreur Pure, et si le roman en lui-même n'est pas extraordinaire, la préface, consacrée aux films d'horreur, m'a intéressée et m'a donné envie de regarder le genre d'un peu plus près. L'été dernier j'ai donc vu le dernier film de George Romero (Diary of the Dead) et j'ai trouvé ça pas mal. Dans la foulée j'ai vu un film américain pour ados basé sur une histoire de malédiction, et, récemment, un film russe du même style, pas mal du tout, mettant en scène une bande de jeunes gens qui, croyant tourner dans une emission de télé-réalité, se retrouvent aux prises avec un tueur fou. J'ai trouvé Jusqu'en Enfer assez intéressant, j'aime bien voir, dans ce genre de film dont les ficelles sont généralement archi-connues, comment elles sont, justement, mises en place. Evidemment, à fermer les yeux dès que la musique devient trop inquiétante, je loupe l'essentiel, mais je ne désespère d'arriver un jour à regarder un de ces films sereinement ou presque (et sans cauchemarder la nuit suivante). A noter la bonne qualité technique du film (photo, montage, FX bien sûr), et une bonne prestation des acteurs. A noter aussi que, j'étais tellement prise par l'ambiance, je ne me suis aperçue qu'après du fait qu'il n'était pas en VOSTF. En fait il a même fallu que je refléchisse un moment pour arriver à réaliser que les dialogues étaient en français (et en espagnol pour certains) - c'est dire si je m'étais laissée embarquer par ce qui se déroulait sous mes yeux. Du moins quand je ne les fermais pas. D'ailleurs, la prochaine fois, c'est décidé : je ne les ferme pas. Parce que j'avoue, c'est très con : j'ai loupé les trente dernières secondes du film, celles où, justement, l'héroïne est arraché à notre monde pour être emporté en enfer (c'était le but, hein) par un esprit malfaisant. Juste eu le temps d'apercevoir une ou deux flammes de l'Enfer, c'est frustrant !

    Et si mon cœur veut bien tenir le coup (ce dont je ne suis pas très sûre parfois), je devrais peut-être envisager de moins traîner mes escarpins à l'Utopia et plus dans les multiplex qui diffusent Raimi et Romero, parce qu'il faut bien le dire, le Cinéma avec un grand C, parfois, c'est gonflant. Sunshine Cleaning, c'est sympa cinq minutes, mais décevant sur la durée (une bonne idée ne suffit pas pour faire un bon film), quand au tout premier film de Scorsese (Who's that knocking…) qui ressort actuellement dans les salles d'Art et d'Essai, il est intéressant pour des tas de raisons, mais s'il sortait aujourd'hui sans le nom de Scorsese sur l'affiche, pas sûr que les critiques seraient excellentes. A plusieurs moments on a l'impression d'assister à une démonstration de ce tout ce qu'on peut faire avec une caméra, à une mise en pratique de la théorie sur le montage, et on cesse de regarder le film comme un film pour le considérer comme un documentaire. A noter par contre les similitudes de ce film avec le roman de Hubert Selby Jr, Last Exit to Brooklyn, roman qui m'avait fait l'effet d'un véritable coup de poing dans la figure lorsque je l'ai lu. Il me semble que la comparaison est plutôt à l’avantage du roman, qui a nettement moins mal vieilli.

    Coraline… bon, ben Coraline, c'est toujours mieux qu'un de ces anime asiatiques qui m'horripilent, mais je me suis un peu ennuyée. Ca manquait d'un je-ne-sais-quoi, c'était peut-être un peu trop triste finalement.

    Heureusement qu'après Coraline, et surtout après Who's that Knocking… j'ai vu Good Morning England. Si les Dieux de la programmation ciné et du temps libre sont avec moi, j'espère aller le revoir la semaine prochaine. Fringues et musiques des années 60, acteurs formidables, Philip Seymour Hoffman en tête, ambiance déjantée… 2 h 15, c'est trop court. A conseiller d'urgence aux dépressifs, à mettre sur la liste des films à voir impérativement deux fois, sur la liste des BO à acheter, sur la liste des DVD à pré-commander…

    Et pour terminer, Story of Jen. Story of Jen, ça commence mal. On a envie de prendre le réalisateur par les épaules et le secouer en lui disant "mais remet cette p*** de caméra sur son pied N*deD*" !!! Après, je ne sais pas si la caméra s'est calmée ou si je m'y suis habituée, ou encore si je me suis laissée porter par l'histoire et les personnages, toujours est-il que j'ai apprécié le film. Les critiques des professionnels glanées ça et là sur le net ne sont pas très bonnes (mais c'est à se demander si certains ont réellement vu le film), celles des spectateurs sont bien meilleurs, et il est vrai que ce film mérite qu'on s'y arrête.

    Jen a quinze ans, elle vit dans un village au fin fond du Canada. Elle est différente des autres ados. Parce qu'elle est d'une famille francophone dans une région anglophone, parce qu'elle porte jeans et sweat quand les autres filles de son âge s'exhibent en mini-jupes et top sans manches, parce qu'elle est la fille d'une mère trop jeune (Marina Hands, surprenante dans un rôle si éloigné de Lady Chatterley) mais durcie par la vie et la mort dramatique de son mari. Le grand'père vit sur elles, mais à distance, car les liens familiaux ne sont visiblement pas le fort de cette famille. Un jour, Ian, le seul membre de la famille du père de Jen qui s'intéresse à elles, débarque pour leur donner un coup de main. Entre Jen et Ian, des liens troubles vont s'établir…

    Un film assez minimaliste : tout est concentré sur les personnages principaux, les personnages secondaires ne sont là que pour servir l'intrigue. Les personnages parlent peu (hormis Jen, en voix off), les décors sont assez simples dans la première partie. Mais l'intrigue qui se déroule sous nos yeux prend des allures de tragédie grecque dans une seconde partie radicalement différente de la première. On quitte alors le microcosme d'un petit village campagnard pour une chasse à l'homme dans les larges paysages du grand nord canadien, et on est très très loin de la bluette made-in Walt Disney dans laquelle un gentil étudiant nord américain taquinait l'élan sur fond de guitares très coools. Car les personnages de Story of Jen ne sont pas forcément très sympathiques. Ian semble n'avoir ni foi ni loi, et couvre Jen d'un regard peu paternel ; les sentiments de la mère de Jen ne sont pas très clairs, et il y a peu d'humanité parmi les habitants du village.

    Quand à Jen… j'ai trouvé le personnage intéressant par sa complexité. Jen a quinze ans, elle se sent différente des autres ados sans bien comprendre les raisons de sa différence, elle vit dans une famille différente mais aussi dans un monde différent dans sa tête. Les autres filles rêvent de flirts, elle rêve du grand amour, à l'image de celui, pourtant excessif, qu'éprouvait son père pour sa mère. Elle a des rapports ambigus avec sa mère, lui en veut certainement du suicide de son père, de l'avoir eue trop jeune aussi certainement, et pourtant, elle s'investit totalement dans une grossesse non désirée, et jsq bout (du film) tente de se convaincre de ses sentiments pour Ian … Il est très rare de voir au ciné la description aussi réussie de sentiments aussi ambivalents, aussi proches, également, de la "vraie" vie. On est loin de Into the Wild, on est très loin aussi de Juno.  Un film, enfin, qui m’a fait penser à un roman d’une romancière canadienne anglophone, Megan Lindholm, plus connue sous le pseudo de Robin Hobb sous lequel elle publie d’interminables sagas de fantasy. Le roman en question, Le Dieu dans l’Ombre, évoque les amours entre une jeune femme et Pan (oui, le Dieu), et de nombreux aspects de Story of Jen m’ont rappelé cette étrange histoire qui a dérangé nombre de jeunes lecteurs fans de Robin Hobb. Attrait d’une sexualité hors-norme, personnage masculin à mi-chemin de l’homme et de l’animal, difficulté pour certains à s’insérer dans une société « normale » ou plutôt, normative, et hymne à la nature… tout cela figure dans Le Dieu dans l’Ombre (à lire, donc), et apparaît donc également dans cette Story of Jen, dérangeante autant qu’attirante.


  • Commentaires

    1
    Feuilles_d_Acanthe Profil de Feuilles_d_Acanthe
    Mardi 7 Juillet 2009 à 19:19
    Au programme des semaines ?enir : Jaffa (avec la sublime Ronit Elkabetz !), Amerrika, Good Morning England une fois de plus pour le plaisir, Terminator, aussi, et tant d'autres encore !
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