• Alcool, Lexomil, et autres joyeusetés

    M - Médecin. Le rendez-vous chez le médecin ce matin a été homérique. A peine avais-je commencé à lui expliquer ce qui m'arrivait qu'il s'est exclamé "Ah, mais vous êtes amoureuse ! Mais vous avez une vie passionnante Mme G. ! Vous êtes en plein dedans, mais ne cherchez pas à lutter, vivez l'instant présent !".

    J'ai tenté de lui expliquer que certes, ma vie est tout à fait passionnante :-/ mais que je paie cela par une grande souffrance : "ah, vous connaissez cette phrase d'un grec ancien : je préfère une vie intense mais brève à une vie morne mais longue."  Là, j'avoue que je me suis demandé s'il se foutait de moi. Je débarque en lui disant que je suis mal, que j'ai des idées noires, que je ne me gère pas et lui me parle d'une vie intense mais brève... Il s'est enfoncé un peu plus en disant "mais foncez, qu'est-ce que vous risquez ?" (euh, me suicider une fois de plus docteur) et a terminé en me prescrivant du Lexomil  en riant "de toute façon, vous pouvez bien avaler la boîte, c'est sans danger, ah ah ah !", et en me rajoutant quatre boîtes de doliprane (pour mon mal à la machoire : "il n'y a rien à faire, ça se remettra tout seul, décidemment ce matin je ne peux rien pour vous ah ah ah !).

    Ah ah ah. 

    Je l'aime bien, ça fait 24 ans qu'il me suit, et c'est vrai que j'ai parfois douté de ses qualités, mais là....

    I - Instant présent. Une parenthèse sur le "vivre l'instant présent". C'est dans l'air du temps ça. Hier soir une de mes copines m'a dit exactement la même chose "mais profite du moment !". Et ça me gooooooonfle. Parce que : quand on est en pleine déprime, ou en plein chagrin d'amour, ou un autre truc comme ça, le fameux "instant présent" : il est douloureux, il est insupportable. Comme l'instant d'avant, et comme l'instant d'après. C'est d'ailleurs pour ça qu'on se suicide, quand ce foutu instant présent se révèle invivable, et qu'on sait que l'instant d'après, et celui d'après encore, le seront aussi. Ce qu'on demande, justement, quand on est mal, c'est qu'on nous débarrasse de la douleur de foutu instant présent, et qu'on nous donne de quoi supporter l'instant suivant.

    A - Alcool ou Lexomil ? A 19h, l'"instant présent" devant bougrement douloureux, j'ai hésité. Un coup de fil à une copine m'a confirmé ce que je craignais : le lexomil allait m'endormir. Vu que mes nuits se sont sérieusement raccourcies, pas question de courir le risque de me retrouver au lit à 8 h 00, pour jouer les hiboux dépressifs ensuite. J'ai opté pour l'alcool. Mauvaise pioche. L'alcool m'est rapidement monté à la tête, sans vraiment améliorer la situation, résultat j'étais mal ET dans les vaps. Là, c'est une grosse déception. J'avais en effet envisagé, s'il s'avère que Le Cousin (dont je n'ai, à ce soir, aucune nouvelle) opte pour une vie de félicités conjugales avec sa Léontine plutôt qu'avec moi, de demander à mon médecin de me mettre en arrêt maladie longue durée, le temps de noyer mon chagrin dans l'alcool en regardant en non-stop les dvd des quatres premières saisons de la série Urgences (22 épisodes par saison). Je devrais peut-être contacter le collègue avec qui j'ai passé le réveillon (celui du boeuf bourguignon) et tester ses herbes magiques.

    A - Amies. Je ne m'en sortirais pas sans elles. J'espère qu'elles ne me feront pas défaut.

    F - Famille. De ce côté là, rien à attendre. Les relations avec mes parents se sont considérablement distendues depuis le mois de septembre, et je me suis montrée très agressive avec ma mère au téléphone hier soir. Mon frère me reproche encore de l'avoir traumatisé lors de ma dernière TS. Parce que c'est ça, ma famille, je me suicide, on ne me demande surtout pas pourquoi, on me renvoie toute seule chez moi en pensant que les médocs des psys feront leur boulot (autrement dit, je rentre chez moi avec de quoi me ressuicider illico mais ça ne dérange personne), et on évite de me demander ensuite comment je vais, dès fois que je réponde que ça va mal. Inutile de dire que personne dans ma famille ne sait plus rien de ma vie privée depuis déjà un certain temps. J'ai un peu d'espoir du côté de ma soeur toutefois. Elle a été très contente que je vienne le 31 décembre, elle a bien perçu que je n'étais pas bien et était contente que malgré tout je sois venue, et a admis qu'à ma place (elle sait juste que je ne suis pas bien, rien de plus) elle resterait probablement prostrée devant sa télé.

    P - Prostrée devant ma télé ? je ne vais pas dire "moi, jamais". En fait, quand quelqu'un va mal, ça emmerde les autres, qui y vont tous de leur "il ne faut pas te laisser aller, il faut te battre". Pas plus tard qu'hier soir, une copine m'a envoyé un sms "allez, bois un coup et va au ciné". C'est chiant : je me bats. A chaque minute, à chaque instant (le foutu "instant présent"). C'est fatigant, c'est épuisant, c'est usant. Parfois je voudrais bien que quelqu'un me dise "oui, tu tiens bien le coup malgré tout, tu fais vraiment ce qu'il faut, mais là je sens bien que tu n'en peux plus, allez, viens pleurer sur mon épaule, je te donnerai un mouchoir".

    P - Psy. Je me demande bien ce que je vais pouvoir lui raconter, à celui-là, mardi prochain. Parce que depuis six mois qu'il me conseille de tuer mes parents, je n'ai pas avancé beaucoup. Si je lui raconte mon histoire du moment, que va-t-il encore bien pouvoir me dire ?

    C - Chatte. Pour le coup, je suis contente qu'elle soit là, tout en culpabilisant : je m'occupe un peu moins d'elle, je n'ai pas vraiment le coeur à jouer. Mais le soir quand elle se couche avec moi, et la nuit quand je me réveille et que je la sens à mes côtés, ça me réconforte un peu.

    F - Froid. Parce qu'en plus, en ce moment, j'ai froid. Le manque de sommeil probablement, ainsi que le fait de  moins manger. Ca va me coûter un max' en chauffage, cette histoire !

    C - Cousin. Le Cousin Germain, donc. Pas de nouvelles de lui depuis hier, juste un mail très rapide en réponse à un que je lui avais envoyé, et il n'y disait rien. Aujourd'hui, rien du tout. D'accord, Léontine est dans les parages, le gamin aussi, et il ne peut pas consulter sa messagerie, ok. Mais les sms ??? c'est quand même plus discret et plus rapide ! je considère donc cela comme de très mauvais augure.   :-(

    G - Gitane. Non loin de chez moi, il y a un terrain et une maison qui appartiennent à des gens du voyage sédentarisés. Comme je partais au cinéma cet après-midi, j'ai pris en stop une gitane âgée, jambes nues dans des tatanes, jupe droite et pull noirs. En montant, elle m'a dit "merci beaucoup, ça vous portera chance !" "ça tombe bien, ais-je répondu, j'ai en ai bien besoin !".

    A - Appêtit. Mon estomac crie famine, et mon cerveau refuse de me laisser m'alimenter normalement. J'alterne donc crampes d'estomac et nausées, c'est super. Ce n'est pas très grave : j'ai pas mal de kilos en trop et je parviens tout de même à manger, en toutes petites quantités certes, mais je ne suis pas encore en train de me laisser de mourir de faim.

    C - Café. L'organisme humain est une chose très bizarre. Le mien doit juger que je suis en ce moment dans un état qui ne supporterait pas la caféine, je ne peux donc plus avaler de café, j'ai dû me mettre au thé après le repas du midi. Beurk.

    H - Hormones. Pour tout arranger, il faut aussi que celles-ci s'en mêlent, ce n'est jamais qu'un élément négatif supplémentaire  :-/

    Oui, je sais, cet abécédaire est en vrac. Oui, ce soir, c'est comme ça.


  • Commentaires

    1
    Rachid
    Mardi 19 Février 2013 à 09:24
    La vie n'est ni simple ni compliquee (en fait elle est neutre) , certains la simplifient , d'autres la compliquent . A mediter :)
      • Feuilles_d_Acanthe Profil de Feuilles_d_Acanthe
        Mardi 19 Février 2013 à 21:16
        Bonjour Rachid. Non, la vie n'est pas neutre : la vie... n'existe pas. Je veux dire, en tant qu'entité extérieure à laquelle chacun de nous serait confronté. Il y a ma vie, parce que j'existe, la vôtre, parce que vous existez. La vie de Marcel, mon poisson (pour autant qu'il y ait une vie sans conscience de celle-ci ?). Ce que vous appelez la vie est simplement la succession d'un certain nombre d'évenements entre la naissance et la mort de chacun d'entre nous, on pourrait appeler cela un parcours. Et le parcours ne sera pas neutre, selon que vous soyez né homme, ou femme, au Cameroun au XVIIIème siècle, en Mésopotamie en l'an -1000, à Paris, 16ème arrondissement en 1940, ou au Tibet en 1970. Certains abordent leur vie d'une façon qui pourra paraitre simple, d'autres pourront donner l'impression de se la compliquer volontairement. Pour autant, est-ce objectif ? nous sommes le résultat d'une infinité de choses (chromosomes, éducation, vécu,...), jusqu'à quel point peut-on dire que nous prenons des décisions objectivement, que nous réagissons aux situations rencontrées de façon neutre ? Dire que son voisin/frère/ami simplifie ou complique sa vie, c'est en fait projeter nos propres idées/jugements/sentiments/frustrations/envies sur la vie du voisin/frère/ami, qui n'est pourtant pas - et ne sera jamais - la nôtre. Si vous le souhaitez, la discussion est ouverte, ici ou sur mon adresse mail, guima33600@laposte.net. :-)
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    2
    Fab
    Jeudi 10 Novembre 2016 à 21:06
    J'ai lu avec attention...Et j'ai bcp aimé. Je ne sais pas trop quoi dire en fait.vos mots, vos maux résonnent en moi. J'ai trouvé votre abécédaire très touchant et très bien écrit. Vous ne lirez sûrement jamais ce commentaire mais j'espère que vous allez bien...
      • Jeudi 10 Novembre 2016 à 21:49

        Bonjour Fab ! Mais si, je lis les commentaires, et j'y réponds :-) Oui, je vais bien, bien mieux, merci. J'espère que de votre côté tout va bien, et vous souhaite la bienvenue par chez moi :-)

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